En réalité, ce n’est pas la mèche le problème
Depuis quelque temps déjà, le vent de la révolution « nappy » souffle sur les têtes (et dans les cheveux) de nos sœurs africaines. Les nappy, ce sont ces femmes qui ont décidé d’assumer leur identité culturelle en refusant désormais d’utiliser tout artifice ou accessoire qui pourrait les faire ressembler aux individus d’une autre race, ou aire culturelle ou géographique. Comme on peut s’y attendre, la première cible de ces guerrières aux cheveux crépus, ce sont les mèches. Mais la mèche est-elle vraiment le problème ?
Un simple accessoire
La mèche est un accessoire de beauté. On ne saurait, en réalité, lui attribuer toute la responsabilité du rejet culturel qui caractérise la plupart de nos sœurs depuis plusieurs dizaines d’années déjà. Pendant mes brefs séjours dans la zone anglophone du pays, il m’est arrivé de voir des mèches ou greffes carrément hirsutes qui permettaient de donner un aspect locksé aux cheveux. Ce qui pose problème, à mon avis, c’est l’utilisation qui est faite de la mèche.

Certaines coiffures féminines et purement africaines nécessitent une chevelure assez longue – les rastas par exemple. D’autres coiffures sont plus belles si la chevelure est d’une certaine taille. Donc, si une demoiselle décide d’utiliser les mèches pour rallonger sa chevelure et faire une de ces coiffures qui nécessitent une longue chevelure, je ne trouve pas de problème, du moment que la coiffure fait ressortir son africanité.
Aliénation culturelle
La mèche devient un problème à la seconde où son utilisation traduit et/ou renforce un certain rejet – parfois inconscient – de la culture africaine. Ce qui arrive généralement chez nous en Afrique c’est que les mèches sont utilisées pour des coiffures ressemblant étrangement aux cheveux européens ou asiatiques ou latino-américains. Les cheveux naturels quant à eux, sont soigneusement enfouis sous l’épaisse crinière qui, pendant des semaines, cachera la vraie nature de la belle.
C’est que, après la colonisation, et avec l’abondance de produits étrangers sur nos chaines de télévision, les standards de la beauté ont progressivement été altérés dans les esprits de nos sœurs – et même de nos frères, malheureusement ! Désormais, on n’est belle que si on a une longue chevelure bien lisse qui nous tombe sur les épaules.

Avec le temps l’utilisation des mèches est devenue la référence en termes de beauté, qui associée à d’autres artifices et sacrifices (notamment la dépigmentation volontaire de la peau) traduit ainsi non seulement le désir pour beaucoup d’Africaines à s’identifier à d’autres cultures, mais aussi, et surtout le rejet de tout ce qui fait leur identité.
C’est mieux sans mèche
Je suis convaincu que l’Afrique se porterait beaucoup mieux sans mèche, et que cette course effrénée vers les rajouts capillaires de plus en plus chers ne peut rien nous apporter de bon pour le développement du continent, autant sur le plan culturel que sur le plan économique.

Les millions de francs dépensés chaque année pour l’achat de mèches brésiliennes ou synthétiques fabriquées ailleurs et importées chez nous ne sont pas un plus pour l’Afrique. D’ailleurs, les mèches synthétiques, dont la durée de vie est limitée, sont un danger pour l’environnement. Et si en plus nos enfants grandissent avec en tête l’idée que leur chevelure est une calamité, alors là, je crois que l’addition est trop salée.
C’est vrai que ce n’est pas la mèche en elle-même, mais plutôt son utilisation qui accentue le problème d’aliénation et de rejet culturel, mais en réalité, on se passerait de cet accessoire inutile qu’on se porterait beaucoup mieux en Afrique.
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