Pour que cessent les violences conjugales
Dans la société africaine, les violences conjugales sont un phénomène que beaucoup considèrent comme normal, au point où, quand on est témoin, ou pire, quand on est victime, on laisse faire. Au Cameroun, cette façon de penser est tellement encrée dans certaines cultures qu’il se dit que pour certaines femmes, la bastonnade est une preuve d’amour ! Selon une étude menée par le PNUD Cameroun, en 2014, 36,1% des femmes et 39% des hommes âgés entre 15 et 49 ans déclarent que le mari a le droit de frapper sa femme pour des raisons banales comme par exemple si elle se dispute avec lui, si elle brûle la nourriture, ou alors si elle sort sans le lui dire. C’est dire si le mal est profond.
Un phénomène répandu aux conséquences effrayantes
Si certaines mentalités rétrogrades sont à la base de ces violences, force est de constater que l’éducation que nos enfants reçoivent – filles comme garçons – contribue à la perpétuation du phénomène qui touche des millions d’Africaines et ce, malgré les statistiques qui sont plutôt alarmantes : en Éthiopie, 71% de femmes ont déjà été confrontées à des violences[i] de la part de leurs partenaires, contre 53% en Namibie et 41% en Tanzanie.
Avec des taux de prévalence aussi élevés, on s’attend à ce que les violences conjugales entrainent des conséquences graves. Et c’est le cas : Selon Amnesty International, en Afrique du Sud une femme meurt toutes les 6 heures en moyenne, tuée par son mari ou son compagnon. Au Zimbabwe, 60% des affaires de meurtres traitées par la Cour supérieure de Harare en 1998 avaient trait à la violence conjugale. En 2003 au Kenya, le procureur général a déclaré que 47% des homicides avaient pour origine la violence familiale[ii].
L’urgence d’agir
L’ampleur des conséquences des violences conjugales montre qu’il est urgent d’agir pour résorber ce phénomène qui, comme nous l’avons dit plus haut, est devenu normal pour la plupart d’entre nous. Face à ce fléau, nous pouvons agir de trois façons :
Agir avant : ici il s’agit principalement de l’éducation qu’on donne à nos enfants. C’est pendant qu’ils grandissent que les enfants adoptent une certaine façon de faire et de penser. Il est donc possible, en leur inculquant les bonnes valeurs, de réduire de façon significative les cas de violences conjugales. Bien sûr, l’éducation des enfants sur ces phénomènes passe par plusieurs facteurs dont le plus important reste sans doute les comportements dans l’entourage immédiat des enfants, en particulier celui des parents.
Agir pendant : quelle est l’attitude à adopter quand on est témoin de violences conjugales ? L’idéal c’est d’agir, de s’interposer, de chercher de l’aide pour empêcher que des conséquences dramatiques n’arrivent et qu’un décès ne vienne gonfler les statistiques qui sont déjà suffisamment inquiétantes. Devant un cas de violence conjugale, ne pas agir c’est devenir complice, exactement comme si on avait contribué à frapper la victime. En plus, le fait de rester passif face à la violence contribue à donner aux enfants une vision erronée du phénomène, et d’une certaine façon, cela les entraîne dans la spirale de la violence « normale ».

Agir après : la réaction des gens après des cas de violence conjugale est également déterminante dans le processus d’éradication de ce phénomène. Pour les victimes, c’est généralement le silence qui les enfonce (en attendant la prochaine bastonnade ?), surtout si l’entourage se montre indifférent comme c’est le cas la plupart du temps. Pourtant il est important de prendre des mesures pour que ça ne se répète pas. Si nécessaire, porter plainte au conjoint violent est une option à envisager. Des textes de loi répriment la violence conjugale, malheureusement les victimes ne portent que très rarement plainte. La création et la multiplication de centres d’écoute, d’accompagnement et de prise en charge des victimes est également important. Certaines victimes se taisent parce qu’elles n’ont ni emploi, ni qualification, et dépendent totalement du conjoint.
Utiliser toutes les armes disponibles
L’urgence de combattre les violences conjugales n’est plus à démontrer, tant les dégâts sont immenses. Pour cela, il est impératif d’utiliser toutes les armes en notre possession pour lutter contre ce phénomène, que ce soit l’éducation des jeunes filles et des jeunes garçons, le recours à la loi ou bien l’éradication d’autres phénomènes de nature à occasionner des cas de violence conjugale, tels que les mariages précoces et l’analphabétisme, entre autres.
_________________
[i] https://www.who.int/gender/violence/who_multicountry_study/fact_sheets/Ethiopie2fr.pdf
[ii] https://www.un.org/africarenewal/fr/magazine/july-2007/non-%C3%A0-la-violence-contre-les-femmes
Commentaires